Commentaire par un ordinateur d’un concert mal compris de lui (2002)

Soliloque sur Anton, Claude, Charles, Orlando, Ludwig et Igor chantonnant
Lecteur audio

Oeuvre pour ordinateur, 12′ à 20′ environ, Commande du festival Inventionen de Berlin.
dédiée à Ingrid Beirer, Folkmar Heim, et Thomas Seelig.


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1. Présentation:

(Texte de programme du Festival Inventionen 2002)

Composer un mini-compositeur. SOLILOQUE sur [X, X, X et X] n’est pas à proprement parlé une oeuvre, mais plutôt une méta-partition que l’ordinateur génère en temps réel à partir de l’analyse et d’extraits des autres pièces du concert. Ceci signifie qu’à chaque concert, l’oeuvre engendrée est différente, non seulement parce que le matériau constituant cette mosaïque est fait du souvenir des sonorités des autres pièces, mais aussi parce que l’organisation de cette mosaïque est elle-même transformée en fonction de l’analyse des échantillons.

Il ne s’agit pas ici que l’on cite et que l’on reconnaisse les autres pièces du concert (les extraits utilisés, qui ne dépassent pas vingt secondes, sont constitués d’un accord ici, d’un signal instrumental là, d’une formule courte que l’on peut à la rigueur reconnaître). Il s’agit plutôt de garder l’esprit et la couleur de ces extraits, d’en tirer par l’analyse une partition, puis de les utiliser de façon détournée comme “instruments” jouant l’oeuvre. Il ne s’agit pas non plus d’engendrer à chaque fois une pièce différente. Le langage reste le même, le mien, sans aléatoire, et la partition est plutôt « interpretée » par le contexte des autres pièces. En d’autres termes, ce n’est pas tant ici l’ordinateur qui interprète un concert, mais le concert qui interprète une oeuvre.

Ce projet d’une méta-oeuvre dépendant du contexte m’a permis de développer plus avant et de façon abstraite les techniques de composition que j’utilisais auparavant dans mes oeuvres instrumentales, issues non d’une grammatologie abstraite sur le signe, mais de la réalité du phénomène sonore. En effet, ces techniques n’opèrent pas sur les paramètres classiques de rythme, de hauteur, et de nuances, issus de notre façon d’écrire la musique en Occident, mais sur des paramètres acoustiques et électroacoustiques du son : ici, il s’agit d’élaborer des techniques de composition non pas sur des hauteurs mais sur des objets sonores, non pas sur des rythmes mais sur des positions de lecture et de durée, non pas sur des intervalles mais sur des vitesses de lecture, non pas sur des nuances mais sur des intensités, des filtrages, et des espaces.

Ce projet de méta-partition contextuelle a été entièrement programmé sur le logiciel Super Collider, avec les possibilités et les contraintes que propose cet « instrument », et avec l’aide précieuse de Thomas Seelig, assistant musical, Frédéric Roskam, pour le portage difficile de OS9 à OSX, et de Thomas Noll, pour le calcul mathématique des canons de Vuza.